Un comportement plus rationnel et, surtout, une plus grande attention à l'intérêt général. La politique doit être repensée

Opinion du 01/04/2022 de Fa Quix

La plus grande prospérité possible pour le plus grand nombre’ : ceci est une déclaration de l'ancien Premier ministre Gaston Eyskens, probablement le meilleur Premier ministre que la Belgique ait jamais connu. J'ai eu un jour l'honneur et le plaisir d'avoir une brève conversation avec cet homme d'État, et cette déclaration, parmi d'autres, est restée gravée dans ma mémoire. Ce qu'il voulait dire en fait, c'était : ‘En tant que gouvernement, vous devez défendre l'intérêt général’. Simple, non ? Mais malheureusement plus aujourd'hui.

Gaston Eyskens a dû prendre des décisions très courageuses. La rationalité, mais aussi la volonté de faire des compromis, ont toujours occupé le devant de la scène ; les intérêts du parti passaient au second plan.

La déclaration d'Eyskens montre non seulement une grande ambition mais aussi les limites de la politique. La ‘plus grande prospérité possible’ est une aspiration, un processus de création de prospérité. On ne sait pas où cela va aboutir, mais c'est une direction à suivre pour le gouvernement. Il n'y a pas d'obligation de résultat. Cette modestie était tout à son honneur. Il ne dit pas : ‘Tout le monde doit être riche le plus vite possible’. Ce serait aussi une belle ambition, mais très peu plausible parce que non réaliste. Et rien n'est aussi important pour la réputation d'un politicien que sa crédibilité.

Et ‘pour le plus grand nombre possible’ ne signifie pas non plus que la politique peut satisfaire tout le monde, pour la totalité de la population. Mais le plus grand nombre de personnes possible. Et puis, il faut parfois être capable de surmonter les différences entre les partis politiques. Cela demande du courage, mais aussi un sens de la relativisation. Pour illustrer cela, une autre citation de Gaston Eyskens qui, lors d'une énième crise - eh oui, il y en avait aussi à l'époque - et soumis à une pression immense, a dit : ‘Mais bon, ce n'est que de la politique !’.

Gaston Eyskens défendait la pensée du progrès, l'optimisme du progrès, et cela a en effet engendré les golden sixties, la période de la plus grande prospérité possible, pour le plus grand nombre. Il a dû prendre des décisions très courageuses. La rationalité, mais aussi la volonté de faire des compromis, ont toujours occupé le devant de la scène ; les intérêts du parti passaient au second plan.

Une fois encore, nous avons besoin d'un comportement plus rationnel et d'une plus grande attention portée à l'intérêt général. Car c'est ce qui nous a manqué lors des deux dernières crises, d'abord la crise ‘corona’ et maintenant la crise énergétique. L’énergie est un approvisionnement de base pour les citoyens et les entreprises. Ce débat doit en effet pouvoir transcender les dogmes étroits des partis politiques et les intérêts purement privés (par exemple, ceux des acteurs du secteur de l'énergie) ? Sinon, ce sera au détriment de la prospérité future, ‘du plus grand nombre’. Il est donc grand temps pour nos décideurs politiques, leurs partis et les autres acteurs concernés de reconsidérer la situation.

Fa Quix, directeur général